Nom de code : krsn

Nom de code : krsn

Gros coup de coeur pour Design & Designer et cette série de livres d’Art
mettant à l’honneur des graphistes, des illustrateurs, des designers, des
photographes plein de talent, d’énergie, d’inventivité et porteurs de sens
nouveaux. Des écrivains de la rue, des conteurs modernes, des sociologues du
temps présent, des alchimistes qui s’expriment à travers un Art qu’ils ont
tous su personnaliser de manière forte et implacable. Des identités, des
personnalités en devenir.

Véritable laboratoire d’artistes doués et squat virtuel de haute
tenue, les éditions Pyramyd réalisent des petits livrets carrés qui tirent
le portrait de ces gribouilleurs urbains à travers de larges extraits de
leurs oeuvres parfaitement reproduites et en y adjoignant de précieux
repères biographiques et textuels. On prend beaucoup de plaisir à découvrir
ce collectif au fur et à mesure des publications.

Autant le dire tout net, on ne peut que tomber en admiration et en amour
devant ce travail sorti tout droit de l’imagination de celui dont le nom
résonne comme un sigle étrange et mystérieux : Krsn.

Que dire du travail de ce jeune prodige ? Sans doute qu’il est à la fois
dérangeant et poétique, tendre et cruel, étrange et beau. Krsn décrit un
monde qui n’existe que par son oeil fait de monstruosité douce jamais
agressive ou sale, un microcosme dégénéré fait de collages de plusieurs
réalités qui misent bout à bout révèlent une tonalité particulièrement
attachante et précieuse.

Dessins, grafs, peintures, sculptures différentes mais de la même famille se
suivent et s’accompagnent pour former un univers parallèle qui attire notre
regard, capte notre attention et nous interroge sur l’état de notre société.
Personnages mutilés, borgnes qui se cachent ou se montrent, ces
hommes et femmes réinventés ne nous regardent plus en face, ils ont perdu
leur illusions en même temps que leurs yeux effacés ou sous d’épaisses
chevelures.

Bien sûr que l’on peut y voir de la misère, de la violence, de la guerre et
du désoeuvrement mais le trait est si sûr, le regard posé si pertinent que
Krsn nous rend familier de cet immonde hydride qu’on arrive pas à maudire ou
détester. Nous entrons dans cette galerie de précaires, de gueules cassées,
de marginaux lunaires, les individus ainsi crées par leur inventeur nous
échappent et se faufilent déjà dans l’urbanité, se décalquant sur les murs, se
dessinant sur les porches et les voitures. Stickers, autocollants de
fortunes, ils font corps avec notre temps, déjà en avance sur le futur,
mais se posant aussi là en témoins de notre passé et lancent des messages
ironiques à notre époque.

Art du temps, art historique, extraordinaire lucidité et génie de l’instant
et du geste, Krsn fait déjà partie de notre mémoire collective référentielle
et c’est tant mieux.

KRSN, 120 pages + couverture, 15X16 cm, rabats : 13X16 cm, broché, quadrochromie, éditions PYRAMYD, 13 euros

KRSN, 120 pages + couverture, 15X16 cm, rabats : 13X16 cm, broché, quadrochromie, éditions PYRAMYD, 13 euros