Insulte à la mémoire de Louise Michel

Insulte à la mémoire de Louise Michel

Peu habitué aux potins mondains et autres infos people, je découvre avec quelques jours de retard une information qui va couper la chique aux ami(e)s de la Commune de Paris. Il en reste ! Le président algérien Abdelaziz Bouteflika a reçu, le 28 septembre, à Alger, le prix Louise-Michel qui lui a été remis par le Centre des études politiques et de sociétés de Paris (CEPSP). Sans commentaires ? Pas tout a fait...

Petit rappel pour ceux qui ont raté les épisodes précédents. Alors que la frégate Virginia emmenait des Communards vaincus vers le bagne de Nouvelle-Calédonie, la déportée Louise Michel (1830-1905) écrivait : « Je suis anarchiste parce que l’anarchie seule fera le bonheur de l’humanité, et parce que l’idée la plus haute qui puisse être saisie par l’intelligence humaine est l’anarchie, en attendant qu’un summum soit à l’horizon. »

Institutrice républicaine, poète, porte-parole des opprimés, combattante sur les barricades parisiennes, infirmière, anticolonialiste avant l’heure, conférencière réputée, co-fondatrice du journal Le Libertaire avec Sébastien Faure..., Louise Michel a eu une vie exemplaire. Chantée par Victor Hugo et Verlaine, elle reçut un accueil populaire triomphal à son retour de déportation. Cette femme qui a fait d’un vieux jupon le drapeau noir des anarchistes a été guidée par un idéal révolutionnaire profond. Sans oublier son humanisme à toute épreuve. En janvier 1888, au Havre, elle fut victime d’un attentat pendant un meeting. C’est elle-même qui ira défendre son agresseur devant la cours d’assises... et elle obtiendra sa grâce. C’est dire si celle pour qui tout pouvoir est maudit se situe aux antipodes d’un Bouteflika.

Le Prix Louise-Michel est attribué tous les ans à « une personnalité de haut rang remarquée pour ses vertus de dialogue, de démocratie, de développement et de paix ». Pas moins. Il faudrait aller demander à Mohamed Benchicou, auteur de Bouteflika une imposture, directeur du quotidien Le Matin qui croupit en taule depuis le 14 juin 2004, ce qu’il pense des vertus du président algérien. Il faudrait aussi demander l’avis des autres journalistes algériens menacés, des associations de familles de disparus...

Mais quelle mouche a piqué les guignols du CEPSP ? Pourquoi baptiser leur prix en toc du beau nom de Louise Michel pour honorer ceux qui incarnent l’exact opposé de ce qu’elle représente ? Depuis 1982, date de la création du prix, des zozos comme Hosni Moubarak, Felipe Gonzales et... Jacques Chirac (si, si) ont gagné la timbale.

En recevant son prix, Abdelaziz Bouteflika a osé saluer la « poétesse rebelle ».

De quoi dégueuler. Vraiment.