Interview : Agnès Bihl, l’humour avec une grande hache

Interview : Agnès Bihl, l'humour avec une grande hache

Un véritable cas de conscience se posait aux anti-pubs cet été. Dans certaines stations du métro parisien, une belle série d’affiches d’Agnès Bihl tapissait les espaces réservés habituellement aux produits de grande consommation. Une fois n’est pas coutume. Les couloirs du métro annonçaient la sortie de l’album Merci maman merci papa, un CD qui débusque avec une ironie grinçante toutes les saloperies du monde. E-terview d’une chanteuse qui n’a pas ses idées dans sa poche.

Paco : Alors, ça fait quoi de voir sa tronche (fort jolie d’ailleurs) dans le métro ?

Agnès : En fait, je n’en suis pas revenue ! (heu... des affiches, pas du métro !)

Paco : Pas trop le trac ? Avec une telle promo, ton sympathique fan-club va vite prendre de l’ampleur. Comment passe-t-on d’un travail assez artisanal, presque familial, à une audience plus importante ?

Agnès : Je flippe à fond, tu veux dire !!!!!!! En fait, je me demande même pourquoi j’ai choisi le plus beau métier du monde au lieu de, tout bêtement, faire le bonheur de ma mère...

Paco : Après avoir autoproduit ton premier album, tu es à présent chez Naïve, une maison qui abrite une palette assez large de talents. Cela va de Carla Bruni à Pierre Perret en passant par Henri Tachan, Marie-Jo Thério, Angélique Ionatos, Marianne Faithfull ou même Dead can dance... Comment trouve-t-on sa place dans un tel catalogue ? C’est grisant ou intimidant ?

Agnès : Plutôt... ni l’un ni l’autre ! "Naïve" est une maison indépendante, à échelle humaine. J’y rencontre des gens qui vont dans le même sens que moi, et, si je suis bien évidemment heureuse et hyper flattée, je n’ai en revanche pas le sentiment d’avoir changé de monde, par rapport à l’autoproduction, mais plutôt d’avoir enfin trouvé une équipe : si quelque chose est grisant, c’est bien ça, et pas d’être dans telle ou telle boite.

Paco : Tu as 30 ans. Et toutes tes dents, pourrait-on dire à l’écoute de certaines chansons qui s’en prennent à la médiocrité et à la férocité des humains, des hommes en particulier. Les églises, les exploiteurs, les armées... en prennent plein la gueule. Te définirais-tu comme une chanteuse « militante » ?

Agnès : Non. Les étiquettes, y compris « féministes » ou « militantes », me font toujours penser à une forme de censure. J’ai un certain engagement (ou un engagement certain, c’est selon), qui me guide dans mes choix, mon écriture... dans ma vie, tout simplement. Mais si je me qualifiais de chanteuse « militante », j’aurais l’impression d’exploiter un filon... Parfois, je chante à coup de gueule, c’est tout.

Paco : Tes textes font toujours mouche. Qu’ils soient « politiques » ou plus intimistes. Je le comprends bien quand tu parles des femmes de 30 ans, des adolescentes ou des drames vécus par les femmes du monde entier. Mais je suis étonné par la faculté que tu as aussi de parler, « de l’intérieur », d’un vieil homme ou des papas du dimanche... Sens de l’observation ou empathie naturelle ?

Agnès : Quand je parle des drames vécus par les femmes du monde entier, je n’ai rien, dans mon quotidien, qui s’apparente à leur vie. Pourquoi cela serait-il différent avec un vieil homme ou un papa du dimanche ? Parce que ce sont des hommes ? Pas très paritaire, tout ça...

Paco : Parmi tes cibles favorites, il y a le couple et le mariage. Dans Méchante, tu dis « Un couple, c’est comme l’armée, faut pas comprendre, juste marcher. » Dans A ton mariage, tu continues : « Le mariage, c’est beau comme une croix, d’ailleurs c’est si lourd à porter qu’il faut souvent s’y mettre à trois. » C’est juste pour amuser le public ou c’est réellement un plaidoyer pour l’amour libre ?

Agnès : Mon père me voyait avocate, mais les plaidoyers et moi, ça fait trop pour que je puisse compter jusque là ! Alors oui, c’est plutôt pour rire... et me défouler un peu aussi !

Paco : Tu es sur la scène du théâtre du Renard depuis le 11 octobre. Tout se passe bien ? Donne-nous trois bonnes raisons d’aller t’applaudir.

Agnès : Hé, dis donc, je ne vais pas me mettre à racoler, non plus !!!!

Paco : Je t’ai connue par hasard, grâce à ma compagne. Elle ne te connaissait pas non plus, mais elle est tombée en arrêt sur la pochette de La Terre est blonde. Peux-tu nous dire un mot de Delphine Courtois, artiste qui signe également la pochette de Merci maman merci papa et l’affiche ?

Agnès : Delphine est une superbe artiste qui m’accompagne depuis les débuts. Elle exposait dans le petit bar où j’étais serveuse, et depuis, j’ai toujours bossé avec elle. Elle est délicieusement folle, elle a un talent à faire la fête, rire et pleurer à la fois, et en plus, elle est blonde ! Elle exposera d’ailleurs ses toiles au théâtre du Renard jusqu’au 5 novembre, le temps de mes concerts.

Paco : Dans Méchante, tu dis qu’il ne faut pas se fier à ta gueule d’ange. Promets-nous d’être chiante encore longtemps...

Agnès : Il ne faut pas toujours croire ce que racontent les chansons... Quand je dis que je suis méchante, c’est de la publicité mensongère, voyons ! Bon... chiante, par contre... je crois que je vais le rester encore un bon moment...



Agnès Bihl, Merci maman merci papa (Naïve/2005) ; La Terre est blonde (Amalgammes/2001).
Agnès Bihl en concert jusqu’au 5 novembre (relâche les dimanches et lundis) au théâtre du Renard à Paris ;
le 20 novembre, à 16h, au Théâtre du Petit Ouest à Rouen (festival Les Chants d’Elles) ;
le 2 mars 2006 à Villejuif au théâtre Romain-Rolland (1ère partie de Maxime Le Forestier) ;
le 11 mars 2006 à Trappes (festival des Voix féminines).

Plus d’infos sur son site web

Agnès Bihl, Merci maman merci papa (Naïve/2005) ; La Terre est blonde (Amalgammes/2001).
Agnès Bihl en concert jusqu’au 5 novembre (relâche les dimanches et lundis) au théâtre du Renard à Paris ;
le 20 novembre, à 16h, au Théâtre du Petit Ouest à Rouen (festival Les Chants d’Elles) ;
le 2 mars 2006 à Villejuif au théâtre Romain-Rolland (1ère partie de Maxime Le Forestier) ;
le 11 mars 2006 à Trappes (festival des Voix féminines).

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