Extension du domaine de la Merde

Extension du domaine de la Merde

Ecrire sur le Merde, ce n’est pas écrire de la Merde. Fort de cette nuance, Bob O’Neill nous livre, ces jours-ci, à la Musardine un excellent essai scatologique qui mérite qu’on s’y attarde sans tirer la chasse.
Au pays de Jean-Louis Costes, après la très coulante chanson de Jacques Dutronc « Merde in France cacaboum », alors que notre nation compte de grands artisans sociologues de la chose comme nos chers amis Martin Monestier ou Roger-Henri Guerrand, le caca a mauvaise presse, la chiure est tabou dans un hexagone où un coq nous réveille chaque matin symboliquement les pattes posées sur du fumier.

Dans son livre fort élégamment intitulé « Variations scatologiques, pour une poétique des entrailles » Bob O’Neill disserte sur la merde sans conchier personne, en rendant des hommages appuyés aux auteurs qui n’ont pas eu peur de s’attaquer à ce sujet putride comme Rabelais, Beckett, Sartre, Rimbaud « (voir le « Sonnet du trou du cul »),Queneau, Paul Valéry et beaucoup d’autres aussi prestigieux.

Fort documenté, bien écrit, ce livre brun est un catalogue du meilleur of la mouise, une encyclopédie textuelle du meilleur goût qui vient compléter les ouvrages déjà parus sur ce champ lexical immense de la merdologie qui n’est, malheureusement pas, en odeur de sainteté pour tout le monde.

Cet acte le plus quotidien et le mieux partager par tout le monde, riches ou puissants, faibles et miséreux continue de diviser la planète, entre culpabilité, gêne manifeste et honte séculaire. « Dis-moi comment tu chies et je te dirais qui tu es », tel pourrait être le message en filigrane de cet ouvrage remarquable, on a tort de sous-estimer le territoire immense de la scatalogie qui a donné de grandes pages littéraires et de beaux moments de plaisirs partagés.

Bob O’Neill évite tous les écueils de ce genre d’essai "casse gueule", ne sombrant jamais dans le vulgaire ou la provocation gratuite mais tentant une belle réhabilitation du caca, du popo avec des mots justes, sans en faire jamais trop, il captive notre attention, nous apprend des choses tout en nous divertissant, car rien de moins triste que la Merde et tout ce qui va avec.

Une vision poétique et scatologique à la fois, ce qui n’est pas du tout antinomique.

Essai pratique, littéraire, historique érudit mais accessible à un très large public « Variations scatologiques, pour une poétique des entrailles » est tout sauf un livre choquant ou sale, c’est une bien belle étude qui ne vous laissera pas de marbre et qu’il vaut mieux lire au salon plutôt que de le feuilleter au cabinet en coulant un bronze.

Un livre précieux qui n’a pas été torché en 5 minutes, mais qui est le fruit d’un beau travail de recherche, un livre que l’on vous recommande chaudement même si vous n’êtes pas particulièrement scatophile, mais simplement comme moi lecteur libre et curieux.

A lire devant, derrière, au milieu et de tous les côtés.

Bob O’Neill, 68 ans, a une formation en philosophie et théologie. Il est psychologue clinicien et analyste. Son intérêt est tout particulièrement attiré par la dimension délirante et hallucinatoire des phénomènes prédictifs du divin. Le texte est précédé d’une préface de Pierre Sansot.

"Variations scatologiques, pour une poétique des entrailles.", Bob O’Neill, Editions de la Musardine, « L’Attrape-corps. » Collection d’essais sur l’imaginaire du corps, Editions La Musardine, 288 pages. Prix : 13 €

Bob O’Neill, 68 ans, a une formation en philosophie et théologie. Il est psychologue clinicien et analyste. Son intérêt est tout particulièrement attiré par la dimension délirante et hallucinatoire des phénomènes prédictifs du divin. Le texte est précédé d’une préface de Pierre Sansot.

"Variations scatologiques, pour une poétique des entrailles.", Bob O’Neill, Editions de la Musardine, « L’Attrape-corps. » Collection d’essais sur l’imaginaire du corps, Editions La Musardine, 288 pages. Prix : 13 €