Avignon 2005 : L’infinie diversité

Avignon 2005 : L'infinie diversité

L’infinie diversité pourrait être le thème de cette 59ème édition du festival d’Avignon, avec plus de 800 spectacles proposés, dans le festival "In", le "Off" et dans la rue. Liberté de choix et découvertes caractérisent ce festival d’exception (retrouvez la ”B.O.” du festival sur plutot.com) . Cette année, on note une fréquentation en hausse, mais aussi, une certaine grogne de spectateurs, relayée par la presse vis-à-vis de certaines productions du "In" (par exemple : Jan Fabre). Vincent Baudriller et Hortense Archambault, les deux directeurs soulignent que « le déchet, demeure le risque inhérent à tout festival ».

En opposition avec la majorité de la presse ne traitant que du festival In, comme si le Off n’existait pas, nous avons souhaité échapper à ce formatage, et nous attarder plus particulièrement sur le Off cette année, sur ce thème de la diversité, puisque le Off, c’est tout à la fois la liberté, sans aucune censure (que celle des moyens financiers), la diversité des 750 spectacles proposés cette année, contre 53 pour le In.
Effectivement, vous ne ferez jamais le tour du Off : même avec trois spectacles par jour, vous n’arriveriez pas à voir les 120 créations du Off ; sa diversité couvre théâtre, mais aussi musique, humour, jeune public et danse ainsi que du cirque et du spectacle de rue...

Le festival d’Avignon, c’est aussi, contrairement à Cannes, des stars accessibles, puisque les Avignonnais sont connus pour ne pas importuner les célébrités. Ainsi nous saluions Jean-Paul Gauthier et croisions Clémentine Célarié, puis échangions quelques mots avec Christophe Alévêque tapant le carton sur la célèbre place de l’Horloge. Vous auriez pu croiser, vous aussi, Tchéky Karyo et Isabelle Carré (présents pour une lecture dans le off).

L’ambiance du festival, ce sont aussi des lieux particuliers, comme notre QG "studieux", l’hôtel de la Mirande, ou encore le créateur de parfums talentueux et indépendant, "Instant du sud" ; Pour se sustenter, Au Grèsduzingo, "galerie d’infusion artistiques" où l’on peut accessoirement boire et manger (actuellement exposition du collectif de graphistes levazz.com : www.levazz.com), ainsi que Terre de Saveur, avec un concept de "gastronomie-bio", ou encore le restaurant La Tour dans un cadre magnifique, avec exclusivement du frais et la personnalité attachante d’un patron épanoui !

Tous ces lieux participent à nous mettre dans la meilleure disposition pour découvrir les coups de cœur 2005, comme les "Joyeux Urbains", Arnaud Joyet et Emmanuel Urbanet accompagnés de Mathieu Rieusset à la guitare et de David Roquier à la batterie, avec leur spectacle "Superlight", "nouvelle chanson française", avec des arrangements très acoustiques, humour et mise en scène d’exception. Découvrez-les avant les autres, car ils vont faire du bruit... récolter des récompenses et en toute logique, le succès du grand public. Leur nouvel album, correspondant au spectacle actuel, est annoncé pour janvier 2006 chez Opéra-music (une critique toutefois : on peut regretter qu’un DVD ne soit pas prévu).

Coup de cœur également au nouveau spectacle de Christophe Alévêque : un festival de politiquement incorrect parsemé de petites perles : citation "alévêquiennes” savamment distillées. Une claque au bien pensant, et un électrochoc pour nous souvenir que la pensée critique existe toujours ! Depuis Coluche, on avait très rarement vu un artiste s’attaquer de façon si forte au politiquement correct et à la pensée unique. Alévêque inclut son groupe de musiciens pour un spectacle contenant une demi-douzaine de chansons, fort bien réussies.

Découverte passionnée, au hasard d’une petite galerie située dans la magique de la rue des Teinturiers, lieu culte des authentiques amoureux du festival, c’est celle d’un artiste plasticien modéliste, Do Conto. Sur son site, l’artiste donne d’emblée sa vision de l’art : l’art c’est moi ! Avec la "Garantie 90 pour cent d’art minimum" appliquée sur ses oeuvres, il entre au panthéon des artistes au "second degré". Ainsi en témoigne le C.V. de cet autodidacte, dont voici un extrait : - juillet 90, première exposition (dans mon salon). C’est une vraie réussite.

Ma femme et mes enfants sont tout de suite enthousiasmés par mes oeuvres. - décembre 92, deuxième exposition (dans le couloir). C’est du délire. Mes 3 uniques admirateurs restent subjugués. Ma femme se met à m’idolâtrer pendant que mes 2 fils pleurent de joie. En août 97, le magazine Beaux Arts lui consacre un sujet, et en octobre 99, "FRANCE INTER" lui consacre 30 minutes. Aujourd’hui, son travail a acquis une résonance européenne et mondiale, à l’image du fort intérêt témoigné à son travail "en Avignon" par un organisateur de festival à Shanghai. Des images exclusives de son travail sur www.plutot.com.

Emportés dans la diversité des spectacles de l’édition 2005, nous avons aussi découvert la nouvelle création de Alil Vardar, "Célibataires.fr", terminée une semaine à peine avant le début du festival, où l’auteur du "Clan des divorcées" nous propose une comédie populaire (encore en pleine évolution), sur le sujet des rencontres sur le net. Un spectacle un peu inégal, mais avec une très bonne énergie et de très bons moments.

Luc Apers, ce belge magicien, nous présentait son spectacle, "L’arnaque", écrit avec Angel Ramos Sanchez : un mélange d’humour, d’absurde, de rêve et de magie. Merci au charismatique Luc Apers de nous faire sortir du cadre de la magie traditionnelle dans laquelle il pourrait se cantonner avec sa parfaite maîtrise technique.

Des reprises, toujours en évolution : l’excellent "Lettres de délation" (compagnie du Fa) mise en scène par Agnès Arnau et interprété avec justesse extraordinaire par François Bourcier. On retrouvait aussi, comme chaque année ou presque, l’un des artistes français les plus connus à l’étranger ; Gustave Parking, avec "Mes meilleurs morceaux”.

La Palme de la meilleure accroche visuelle revenait sans aucun doute à l’affiche de "Quinzaine du blanc chez les trois suisses" ("Côte du Rhône production").

Dans l’ambiance de folie des rues d’Avignon, on pouvait croiser les parades, plus originales et colorées les une que les autres, et destinées à faire la promotion des spectacles du Off. Parmi elles, celle de "Cendrillon s’en va t’en guerre", avec trois actrices remplies d’énergie, ou encore celle du théâtre de l’Oulle, et puis encore Fahem (Fahem Quintet), ce guitariste et compositeur flamenco jazz hors pair qui, en un titre joué en extérieur, avait convaincu de la nécessité de se rendre à son concert.

En écho à Fahem, la guitare de El kado, se donnait à la rue, pour proposer, lors de son spectacle de rue, son album arabo-flamenco "arabesque".

Les spectacles de rue font partie de la richesse et de la diversité du festival. Nous retrouvions avec plaisir cette année "Fausses Notes et Chutes de Balles", jonglage et accordéon, ou encore String Fever, ces violonistes anglais dégantés, et découvrions Daniel et Reynald, duo acrobatique venu tester son nouveau spectacle, ainsi que la toute jeune compagnie Hip-Hop "clandestin", et enfin Carymelle, pour de magnifiques maquillages artistiques et peinture sur corps .

Une belle histoire aussi, celle de ce jeune pianiste et compositeur surdoué, Steve Villa Vassone qui s’est vu offrir un piano par un magasin de musique enthousiasmé par cette personnalité artistique hors du commun. Le spectacle de rue, synonyme de liberté et de jeunesse, ce fut le cas aussi avec Laurence Fleurquin et Fabien Mouton, responsable et animateur d’une colonie de vacances spécialisée théâtre, qui ont inspiré un spectacle créé par les jeunes plein de drôlerie, de ferveur et d’enthousiasme.

Voilà, un bref parcours, dans l’infinie diversité de l’un des fleurons de la Culture Française, en vie et en évolution, et dans l’esprit du nom illustre de Jean Villard qui a donné cette jeunesse et ce vent de liberté au festival. Il ne reste qu’à vous proposer, lectrice et lecteur, de s’y retrouver ensemble l’an prochain !