Interview : le photographe Maury Perseval

Comment ne pas être sensible aux photographies de Maury Perseval ? L’"amateur" éclairé n’a rien à envier aux professionnels, car cet homme de mots, avocat de métier sait mieux que personne mettre en scène les êtres et les natures pour les nourrir de son vécu littéraire et de son amour de la Femme (avec un grand "F").
Des visions majoritairement en noir et blanc qui subliment tous les états de la création. A voir, à revoir pour puiser dans la beauté, la grace.. un message artistique et poétique de tout premier plan.

1. Bonjour Maury Perseval, je suis ravi de converser
avec vous car je suis en admiration devant votre travail photographique que je trouve très esthétique, plein de signifiés et aussi d’une grande poésie. Sur votre
site on trouve vos oeuvres, quelques explications
techniques mais rien sur vous et votre parcours. Vous cachez-vous derrière votre propre production ?

Tout d’abord merci pour vos commentaires louangeux
auxquels je suis trés sensible.
Toutefois je crains qu’il y ait confusion en ce que je
ne suis pas un professionnel de la photographie.
Certes je pratique cet art depuis longtemps, 1969 pour
être précis, aprés qu’un ami m’ait enseigné les bases
du développement et du tirage, mais je suis en fait
Avocat.

De sérieux problèmes de santé m’ont fait abandonner la
profession il y a quelques années et dans la foulée
nous avons, mon épouse et moi-même, quitté Paris pour
la Touraine où nous avons le privilège d’avoir pour
demeure une Abbaye du XIIIème.

Je n’avais jamais renoncé à produire des images, mais
il est clair que le temps libre dont je dispose depuis
lors m’a incité à intensifier ma production.

Pour répondre précisement à votre question et faire le
lien avec la suivante j’ai au contraire le sentiment
que mes photos sont révélatrices de ce que je suis.

2. Dans vos photos on trouve des aller-retour
Paris/Nomandie, de
l’urbanité, des voyages, des univers fantasmatiques,
des nus et des
maques et une très belle femme élégante. Est-ce un peu cela
votre univers ?

La "trés belle femme" vous remercie.
Mon épouse, puisqu’il s’agit d’elle est tout à fait
flattée.
Pour le reste il s’agit donc bien de ma vie dont je
reconnais bien volontier qu’elle est, mis à part la
maladie, absolument favorisée.

Quant aux "univers fantasmatiques" ils sont le reflet
de l’impregnation littéraire qui a été mienne, la
découverte des surréalistes ayant été le véritable
déclencheur d’un désir impérieux de création.

3. Vous semblez travailler en argentique
princiaplement, mais aussi en
numérique tout en utilisant souvent la palette
graphique pour des
assemblages troublants... la technique semble être un
langage véritable
chez vous ?

Je suis passé à la prise de vue numérique depuis prés
de deux ans.
Mais dès avant je scannais mes négatifs pour réaliser
numériquement mes "images composées".

Curieusement depuis que je possède des boitiers
numériques je reviens à la photo pure et dure sans
autre artifice que le passage en noir et blanc.
Je suis convaincu de ce qu’une création artistique ne
peut être aboutie qu’à la seule condition d’être le
résultat d’une maitrise complête des techniques sur
laquelle elle repose ; à chacun de revêtir ce savoir-faire indispensable de leur imaginaire, leur
sensibilité, leurs concepts.

4. Il y a une grande délicatesse et pudeur dans vos
visions, j’ai envie
de
parler d’oeil littéraire, précis, respectueux...

Ma culture est avant tout littéraire et
cinématographique ; l’un et l’autre de ces arts sont à
la source, inconsciente, de mes réalisations.
Ce serait donc probablement que j’aime les films et
les ouvrages précis, respectueux...

5. Quels sont les artistes plasticiens ou les
photographes qui
trouvent
grace à vos yeux ?

Toutes les images m’intéressent même celles qui ont
été réalisées par des artistes dont l’univers m’est
etranger.
Jean-Loup Sieff a été probablement le photographe qui
m’a le plus marqué jusqu’à m’inspirer directement,
aujourd’hui encore. J’aime ses gris somptueux, son
utilisation du grand angle, sa vision tout à la fois
tendre et sensuelle de la Femme, la rigueur de ses
compositions,...

6. Comment est apparu le thème du masque dans votre
travail
photographique ?

J’ai parfois le sentiment que la présence d’un visage
sur un corps dénudé est indécent ; les masques
vénitiens ont su gommer ce sentiment tout en
signifiant un aspect ludique et mystèrieux.

7. Qu’est-ce qu’une photo réussie selons vos critères
à vous ?

Que ce soit le début d’une histoire que le lecteur
peut s’approprier.

8. Toutes vos oeuvres sont très esthétiques mais
jamais
esthétisantes... je
dirais qu’il y a une part d’artisanale dans le bon sens
du terme,
êtes-vous
d’accord avec cela ?

J’ai, comme beaucoup, une admiration sans borne pour
le travail des artisans, les vrais, ceux qui, pour
réaliser un chef d’oeuvre ou plus simplement une
commande, vont suer sang et eau sur leur établi,
devant leur chevalet, detruire ce qu’ils ont réalisé
parce que cela ne leur convenait pas, pour recommencer
encore...
Cela n’a rien à voir avec l’activité créatrice qui est
la mienne ; c’est en partie pour cela, qu’à mes yeux,
la photographie est et restera un art mineur.

9. Quels sont vos projets artistiques à courte et à
longue échéance ?

Continuer à réaliser des images, encore et encore !

10. Par quoi désirez-vous terminer cet entretien cher
Maury Perseval ?

Un verre sous le cloître !