Dernière métaphore avant l’Aurore

Dernière métaphore avant l'Aurore

Il est bien difficile de parler de la poésie, encore davantage de la commenter sans la paraphraser malhabilement ou pis encore, la dénaturer sans vergogne.

Aucun résumé d’un grand texte poétique n’est acceptable ou même satisfaisant.

Alors la seule solution est peut-être d’évoquer une ambiance, une voix, un ton, un caractère qui se dégageraient derrière une strophe, une interligne, un silence, ou un paragraphe parfaitement rythmé et mis en mots avec courage car « vivre n’est pas une facilité ».

« Dernière fin du monde avant le matin » est une étrange conversation à deux entités avec l’Enfance et l’innocence perdues. Un échange sans lutte de pouvoir, sans mauvaise morale, sans volonté systématique de démontrer, convaincre, dénoncer ou épater.

Deux voix dans la nuit qui donnent du sens et qui sont assez généreuses pour laisser le champ des interprétations ouvert, laisser chaque lecteur, y mettre sa propre histoire.

Ce qui transparaît, ce sont des émotions, des clartés, des sensations que l’on nous avait fait oublier. L’auteur excelle dans cette tentative tendre et fragile de renouer avec un temps qui n’est plus ou qui n’a pas pu être. Lorsque grandir peut être un rêve à jamais brisé...

Le recueil poursuit un dialogue interrompu par la vie avec calme et bienveillance pour éloigner les traumatismes de la guerre et les mois d’Octobre sanglant. Mêlant images et mots, justes, précis, Sandrine Rotil-Tiefenbach nous invite dans un drôle de monde entre terreurs nocturnes et douceur champêtre. L’enjeu ? Peut-être se rendre compte que toutes les questions n’ont pas de réponses, que les énigmes et les mystères qui nous enferment ne sont jamais ceux que l’on croit.

« Dernière fin du monde avant le matin » est un texte faussement simple qui nous échappe et nous hante, qui nous désarçonne, aussi. Non, on ne peut pas s’attendre à cela tant ce havre qui est offert est original, complexe et pénétrant.

Les poètes sont des bâtisseurs d’éphémères. A ce jeu-là, Sandrine Rotil-Tiefenbach est un maître d’œuvre ambitieux et modeste à la fois. Sa cosmogonie est belle, sensitive et riche mais son discours flirte avec les grandes questions essentielles et universelles : la naissance, l’amour, la mort et la punition céleste. Le bien, le mal, l’absence et l’injustice des disparitions.

L’œil de l’auteur se balade dans des « forêts de souvenance », trace une route jamais empruntée. Parfois il tombe, l’œil se fait mal au genou, saigne mais qu’importe, il va de l’avant sans trop se poser de questions.

Il faut lire la poésie de Sandrine Rotil-Tiefenbach pour ne pas être rattrapé par ses propres cauchemars.

Ne nous abîmons pas dans l’abyme d’une enfance bafouée. Lisons, rêvons.

"Dernière fin du monde avant le matin", Sandrine Rotil-Tiefenbach, Poésie, Mélis. Préface de Jean Orizet

Le site de l’auteur

"Dernière fin du monde avant le matin", Sandrine Rotil-Tiefenbach, Poésie, Mélis. Préface de Jean Orizet

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